Des milliers de minoritaires mettent en difficulté les fonds spéculatifs, vendeurs à découvert

Des milliers de minoritaires mettent en difficulté les fonds spéculatifs, vendeurs à découvert

Tous les médias racontent actuellement l’histoire GAMESTOP : la mobilisation de petits porteurs qui par leurs achats nombreux ont fait perdre à la bourse de New-York des milliards aux hedge funds spéculant à la baisse sur les actions de cette entreprise de jeux vidéos.

Notre association qui a réussi en 2020 à contraindre le groupe japonais KPP de relever son offre sur ANTALIS y voit la confirmation de l’émergence d’un nouveau pouvoir des petits porteurs via une mobilisation de masse au travers des réseaux sociaux. Rappelons que l’ASAMIS avait appelé les minoritaires à mettre des ordres d’achat à 0,002 euros au-dessus de l’ordre massif d’achat passé par le courtier présentateur de l’offre, le privant ainsi de pouvoir récolter les actions nécessaires au passage du seuil de 90%. Le risque minime pour les minoritaires bloquait la mise en œuvre de l’OPA suivie d’un retrait obligatoire.

Revenons à GameStop : cette société gère environ 5000 magasins de jeux vidéo situés dans des centres commerciaux. L’activité déjà affectée par la vague du numérique des jeux en ligne a subi un nouveau coup dur avec la pandémie qui a vidé les centres commerciaux de ses clients. GameStop qui perdu 275 millions de dollars sur son dernier exercice, (pour un chiffre d’affaires de 5,2 milliards) n’a donc rien pour créer l’enthousiasme des investisseurs autres que celui des fonds spéculatifs vendeurs à découvert. En effet ceux-ci en pariant sur la poursuite de la chute de l’action atteignait 2,75 dollars semblaient assez sûrs de gagner un pari facile.

Cependant un grain sable est arrivé lorsque le site américain de recherche financière Citron resarch spécialisé dans la dénonciation de sociétés surévaluées ou manipulées a annoncé avoir parié sur la baisse de l’action. Il a déclenché une réaction imprévue, celle d’une armée de boursicoteurs qui s’est mobilisée via des forums en ligne pour contrer cette position. Certains analystes la dépeignent une jacquerie d’inconséquents : «Ces boursicoteurs n’investissent pas, ils s’amusent, ils semblent totalement euphoriques, accompagnant leurs messages d’émojis représentant des fusées ou des diamants, analyse Jean-Frédéric Nussbaumer, conseiller en investissement à la banque Gonet. D’autres voient l’apparition d’un nouveau pouvoir, celui de la masse de petits porteurs dont le regroupement est facilité par les réseaux sociaux tels que Tweeter, facebook, reddit…Ils constatent aussi que des applications comme Robinhood permettent aux particuliers maintenant de parier à la hausse ou à la baisse sur une action avec une mise de fonds minima.
L’action Gamestop après avoir grimpé de près de 20 % lundi 25 janvier, a doublé mardi, et a vu son cours multiplié encore par 2,35 mercredi, pour atteindre 347,51 dollars en clôture. L’entreprise valait alors 10,3 milliards de dollars,. Elon Musk, qui avait déjà contribué dans le passé à faire perdre des milliards de dollars à des fonds spéculatifs pariant sur la chute de Tesla, s’est fendu d’un petit tweet le 26 janvier, alimentant encore l’envolée du titre. Le 28 janvier : (AOF) « L'action.. attendue encore en hausse de 30% à plus de 440 dollars en préouverture après s'être déjà envolée de plus de 130%, mercredi. Sa capitalisation a ainsi dépassé hier les 24 milliards de dollars. »

Les boursicoteurs ont alors changé de cible et ont fait s’envoler d’autres entreprises en crise : les salles de cinéma AMC, dont la valeur a triplé dans la journée de mercredi, et le fabricant de téléphones Blackberry, qui a pris 80 %.

Ce phénomène angoisse désormais les gestionnaires de hedge funds qui parient depuis des semaines sur l’effondrement de Wall Street, tel Carson Block, de Muddy Waters.

En attendant la société de courtage TD Ameritrade a cessé de passer des ordres sur Gamestop et AMC. On a aussi appris que le groupe new-yorkais Melvin Capital a été contraint pour solder sa position, de solliciter un prêt de 2,75 milliards de dollars (2,27 milliards d’euros) auprès de ses concurrents pour éviter une faillite. Citron capital fund a déclaré le 28 janvier avoir soldé sa position avec une perte de 100% sur Gamestop

La dérégulation aurait-elle atteint ses limites, tant pour les marchés boursiers qu’au niveau de la mondialisation ? La pandémie du COVID a mis en évidence les risques de la mondialisation tant au niveau sanitaire qu’économique et souligné avec le rôle redécouvert des frontières, que la « main invisible du marché » était une théorie largement dépassée.

La sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren n’a pas manqué de le souligner dans un tweet : « Pendant des années, ces mêmes fonds spéculatifs et investisseurs fortunés consternés aujourd’hui par les transactions sur Gamestop ont traité le marché boursier comme leur propre casino alors que tout le monde en paie le prix ». Elle a ajouté qu’« il est grand temps pour la SEC et les autres régulateurs financiers de se réveiller et de faire leur travail. Et avec une nouvelle administration et des démocrates qui dirigent le Congrès, j’ai l’intention de m’assurer qu’ils le feront ».

L’ASAMIS espère qu’en Europe et particulièrement en France, des entreprises fortement attaquées par des fonds spéculatifs via des ventes à découvert entraîneront des mobilisations semblables qui mettront difficulté les fonds spéculatifs et permettront une défense des intérêts des actionnaires minoritaires.

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